A côté

Le vent froid balaie le désert de ses rafales tranchantes comme des rasoirs, si bien que le groupe Dix Onze Douze, se retrouve à se blottir silencieusement autour du feu.
Fawkes y jette quelques bûches, ramassées plus tôt dans la journée.

- Et bien ? Y'a-t-il obligation de suivre les Infidèles en silence ? Ou bien pouvons nous parler entre-nous ?

Il regarde chacun des membres, un lueur d'incompréhension dans son regard.

- Si nous ne pouvons parler des plans de productions, ni du trajet, peut-être pouvons nous parler... Je ne sais pas, d'autre chose ? Je ne comprends pas. Sincèrement.

Son regard se perd dans le feu, où le bois rongé par les flammes craque, rythmant la nuit étoilé.

- J'ai l'impression... de ne pas valoir mieux qu'un zombi. Nous sommes là, à suivre, en silence, à ne rien faire. A ne rien pouvoir faire. Est-ce qu'il y a un sens à tout ça ?

Ce fut Onze qui répondit, d'une voix froide, un brin autoritaire :

Rien ne nous oblige au silence. Nous suivons les Infidèles parce que sans eux, c'est la mort assurée, et rien n'est encore figé pour le moment. Nous allons vers Twitt', une fois là bas, chacun avisera.

Nous voyageons en deux groupes certes, mais rien ne t'empêche Fawkes de parler aux autres. Et cesse de les appeler Infidèles. Les Infidèles sont morts il y a bien longtemps, avant même ton arrivée. Seule Naïma se revendiquait en être une. L'identité Infidèle n'a jamais été celle de notre groupe.

Ce sont les Affranchis. Mets toi ça dans le crâne.

- Je ne demandais pas pourquoi nous suivions les "Affranchis", mademoiselle Onze. Mais juste que.. Rien ne se dit entre-nous. C'est... dommage.

Il soupir et se lève.

- Maintenant, effectivement, si les discussions sont également interdites. Bonne soirée.

(HRP : Je suis désolé Mais pour moi les deux groupes sont séparés, parce qu'autrement, je ne comprends pas pourquoi Naïma ne dit rien. Elle refuse de voyager avec nous, ce que je comprends, mais on fait "comme si de rien n'était et on campe côte à côte. C'est pour ça que je reste bloqué sur le chacun dans son coin.)

La jeune femme regarda Fawkes se lever, d'un air las et passablement énervé :

Qui a dit que les discussions étaient interdites ? Arrêtes de tout interpréter à ta façon Fawkes, tu es libre de franchir la distance qui nous sépare des Affranchis et d'aller les voir. Tu n'es pas enchainé que je sache.

Mais si personne ne vient te voir... Peut être est ce dû à ce cynisme et ce pessimisme que tu traines partout. Les temps ne sont pas toujours roses, nous avons tous nos propres soucis, nos questions, nos remises en cause.

La mort de Muse a causé beaucoup de dommages. Il faut laisser le temps faire son oeuvre.

Un cri s'éleva dans une tente proche.

Tu m'excuseras de ne pas accorder plus de temps à tes états d'âme, mais ma fille me réclame.

Fawkes haussa les épaules.

En matière d'états- d'âme, chacun semblait fort bien doté et... Il n'y avait rien d'autre à dire. A quoi bon discuter : Il était un barbare pour certains, un cynique pessimiste pour d'autre. Personne n'avait rien à gagner de sa présence, et lui-même n'avait définitivement rien à gagner des autres.

Il alla chercher ses affaires sous sa tente et laissa ce qu'il ne voulait pas, ce qui n'était pas à lui, puis se rendit au camp des Affranchis qu'il traversa, silencieux.
Il avait l'impression de ne pas être à sa place. D'être un loup dans la bergerie.
Il se alla droit vers Naïma, et lui tendit le collier de Muse.

- Tenez, mademoiselle Naïma. Je vous le rends. Là, où je vais, je n'en aurais pas besoin. J'espère que tout ira bien pour vous et les vôtres.

Je pense que cette mascarade a assez duré et il va falloir faire la paix ou au pire crever l'abcès.

Hrp: c'est vrai quoi en plus le forum est tout mort depuis qu'on est partis
ya vraiment aucun intéret à se séparer, c'est chiant

[HRP : Euh vous vous rendez compte quand même que ce sont les vacances depuis presque une semaine, et que certaines personnes ont autres choses à faire que de passer leur temps sur le forum ?! C'est normal qu'il y ait moins de rp, arrêtez de râler bande de no-life ! ]

Gray avait assisté à la scène sans tiquer, sans lever un de ses sourcils interrogateur, ni même esquisser une moue désapprobatrice devant la réaction de Onze. Ses deux verres de protection, deux orbites creux d'un crâne cadavérique, avait suivit Fawkes jusqu'à sa tente, puis, vers le camps des "Affranchis".

"Je pense que cette mascarade a assez duré et il va falloir faire la paix ou au pire crever l'abcès."

C'était Jack qui avait parlé. L'évidence du propos lui retirait quelque peu de sa pertinence aux yeux de Gray mais certaines choses, même les plus évidente, gagnait à être dites.

"Faire la paix?"

Faire la paix impliquait qu'il y ai eu la guerre... Une guerre froide, si l'on n'en jugeait par la façon que les deux camps avaient de se regarder un chien de faïence.

"C'est peut être un peu tôt..."

Il ne lâchait pas Fawkes du regard.

"Pour l'instant, l'important c'est de connaître son camp."

Gray voyant Fawkes seul, se leva et alla le rejoindre en silence dans le camps "opposés".
Ses pas provoquaient des craquements dans la neige presque glace qui recouvrait le sol et semblait être plus bruyant à mesure qu'il se rapprochait de Fawkes. Venant se positionner aux coté de l'homme, il laissa passer un silence puis :

"Alors? Qu'est ce que tu fais là?"

Fawkes n'attendit pas la réponse de Naïma et retourna au camp, chercher ses affaires, dès elle eut pris le chapelet, si bien que son remerciement lui échappa totalement. Il n'attendait plus de discuter avec les uns ou les autres : Il avait pris sa décision et il voulait partir le plus tôt possible.
Il croisa Gray sur le chemin. Le double reflet des épaisses lunettes lui renvoyait les images déformées de son visage. Deux ersatz tout droit sorti d'un enfer dantesque.

- Bon Docteur. J'avais quelques choses à régler. Et vous ? Comment se porte la petite de mademoiselle Onze et monsieur Henri ?

Il parlait en marchant droit sur sa tente.

"A vrai dire, je ne m'en soucie guère. L'enfant est joli et visiblement en bonne santé, mais dans un soucis mélodramatique, c'est Naïma qui l'a mit au monde. Autant dire que j'étais encore une fois hors du coup. Nan, ce qui me préoccupe c'est toi Fawkes. Après toutes ces choses qu'on a vécu ensemble, je sais toujours pas ce qui tourne dans ta putain de tête. Et pourtant c'est pas comme si on avait pas essayé... Tu te souviens combien de fois tu m'a dis "Il faudrait que je vous parle d'un truc." et moi je te disais "Bien sur pas de problème." et puis on souriait niaisement puis ensuite rien du tout. Mais je crois que je commence à comprendre deux ou trois petites choses. Enfin j'espère..."

Gray marqua une courte pause mais reprit avant que Fawkes ne l'interrompe. Sa voix était plus calme, plus lente, plus préoccupé :

"La mort de muse, c'est quoi pour toi? Ca te renvoie à quoi?"

La question du médecin arrêta nette la marche de Fawkes. Il regarda Gray comme s'il s'agissait d'un canard qui venait de lui poser une question métaphysique. Visiblement perturbé, il fit quelques pas pressés, regardant le sol devant lui, puis s'arrêta de nouveau pour se retourner vers Gray.
Sa bouche s'ouvrit et se referma après une vague hésitation, mécanique détraquée, incapable d'articuler suffisamment pour sortir des sons.

- Je...

Une secousse sismique déforma la plaine de son front, tandis que sous ses sourcils froncés, son regard agité cherchait à percer les brumes de sa réflexion. Gray avait raison. Certains ne le jugeaient que sur son air de junkie, rongé par les substance plus ou moins raffinées dont il inondait son corps, mais il avait touché un point sensible, et le coup fit l'effet du déflagration dans l'esprit de Fawkes.
Ses yeux glissèrent, sans qu'il s'en rendit compte, jusqu'aux reflets déformés de lui-même qui le regardaient inquisiteurs. Eux savaient.

- Je gagnais ma liberté en le tuant froidement, sans me laisser submerger par cette... vague de violence. Je le faisais de manière réfléchi pour sauver ce que sa propre soif de sang mettait en danger.

De longues secondes s'égrainèrent, le temps que ses reflets laisse sortir ce qu'il allait dire.

- Il était cette liberté dont je me privais.

Gray écouta Fawkes avec attention, sa compassion masquait par ses épais verres froids et dures.

"Vous étiez enchainé... par la violence, la pulsion de violence. D'où venez ces chaînes Fawkes?"

Gray parlait avec plus d'hésitations maintenant comme un archéologue avançant à tâtons dans un labyrinthe de mots et de significations qu'il devait choisir judicieusement.

Il réfléchit longuement, remontant le cours de ses pensées comme un explorateur remonte un fleuve inconnu sur une pirogue instable, et plus il s'enfonçait avant, plus la jungle devenait épaisse et sombre, plus les cris de souffrance se faisaient fort.

Les yeux de Fawkes cillèrent un instant, comme s'il sortait d'un profond sommeil. Il eut un sourire carnassier tandis qu'apparaissait un sourire carnassier.

- Il n'est plus temps, docteur, je dois y aller.

Il reprit sa marche vers le camp.

Gray sourit tristement alors Fawkes s'éloignait...

"C'est çà... Fuit Fawkes. C'est tellement plus simple, tellement plus facile."

Gray avait murmuré ces mots lentement, entre ces lèvres pincés et sans le vent froid qui portait les sens plus loin, Fawkes n'aurait probablement pas entendu.