Les hommes qui coupaient les oreilles des chameaux...

Searclaw parcourut la courte hampe de sa lance, les doigts inquisiteurs, presque caressants. Le contact était évocateur du passé, mais rassurant quelque part. D'une main nonchalante il tata l'extrémité de l'arme que Fawkes lui avait confié, appuyant doucement la pointe contre sa paume. Aiguisé. Le jeune homme sourit. La lance. A peu près la pire arme qu'on puisse utiliser en combat solitaire. Mais redoutable en formation. Il pensa à l'entrainement à la baïonnette, il y'a longtemps. L'instructeur avait dit que c'était vraiment pour la forme. En réalité, à un contre un, le poignard était de loin préférable. Toutefois, à la vue des chameaux, que le jeune homme avait imaginés moins grands, la lance était sécurisante. Aux signes de Matthias, Searclaw secoua la tête. Il avait chassé l'Alpaga dans les Andes Colombiennes, et se rappellait des techniques des Yano-Mami. Le jeune homme s'accroupit dans l'herbe et s'adressa doucement à Matthias :

- Les encercler ça sert à rien. Ce sont des animaux de troupeau, ils partiront tous dans la même direction. Ça serait parfait si on voulait qu'une seule proie, mais là le but c'est de faire du rendement. Juste là bas, le sol est accidenté, et caché par les herbes, y'a plein de trous de lapin. Je propose qu'on y creuse encore plus de trous. Ensuite on fait paniquer le troupeau et le guidant vers nos pièges. Ils seront plusieurs à se casser les pattes dans leur course. On aura plus qu'à les achever. En plus, comme ça on risque pas de se faire piétiner. Vous en pensez quoi ?

YIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIHAAAAAAAAAAAAAAAAA !!!!!!!!!!!!!!!!!

John, perché sur un des chameaux, passa au galop devant les deux hommes.

Torse nu, il faisait tourner son t-shirt autour de sa tête comme l'aurait fait un cowboy.

Il ne semblait pas se préoccuper de la chasse. A vrai dire il ne pensait qu'à s'amuser. Cela faisait tellement longtemps qu'il n'avait pas vu de chameaux !

Il était secoué dans tous les sens mais il ne semblait pas en être embêté. Au contraire, il en riait de plus belle !

Apercevant ses camarades cachés dans les hautes herbes, il les salua amicalement.

Youuuuhouuuuu ! Les copaiiiiins !!!

Avec un signe de la main pour John, Matthias se redressa néanmoins d'un air consterné.


"Qu'est ce qu'ils ont avec ces bestioles..."


Il regarda Searclaw pour dire avec un demi sourire:


"Commençons à creuser. On pourra peut être attaquer quand chacun aura fait son tour de manége.

T'sais ya un vieux proverbe Libanais qui disait "Si le chameau pouvait voir ses bosses il tomberait de honte..."

AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhh !!!!!!!!

John repassa devant ses compagnons. Mais cette fois il était devant le chameau, accroché au cou de la bête qui semblait ne plus trop apprécier les jeux de l'écossais.

John luttait pour se rétablir. Il aurait voulut appeler à l'aide, mais en quelques secondes il était déjà loin.

Searclaw haussa un sourcil lorsque l'écossais passa devant lui en hurlant, accroché à l'encolure du chameau, avant de se tourner vers Matthias, qui pour une fois paraissait vaguement sérieux, pris par l'attente de la chasse :

- Bon, Matthias, je crois que du coup on est tout seuls... Va falloir creuser vite et bien, avant que notre ami poilu ne fasse déguerpir les bêtes... Il nous faut des trous droits d'environ quarante centimètres de profondeur. Faut améliorer les trous de lapins, le sol est déjà meuble. Ça devrait pas prendre plus d'une heure, avec de bons outils.

Gray, semblant sortir de nulle part, c'était soudainement planté à côté de Matthias, les yeux ronds comme des assiettes de porcelaine pré crash sous ses verres... ronds comme des assiettes de porcelaine pré crash.

"C'est une remontée d'Acid ou John vient il réellement de passer accroché au coup d'un chameau en pleine course?"

Demanda t'il en fixant droit devant lui.

John avait put se rétablir. Mais il sentait comme un danger : la bête en furie ne voulait plus s’arrêter.

Il continua à batailler quelques secondes en cherchant une solution. Puis il fit ce que son instinct lui dictait et qui lui semblait le plus sage. Il ouvrit grand la bouche, et mordit le chameau au cou pour le tuer.

Il ne rencontra cependant qu’une épaisse couche de poils.

C’est ce moment que choisit sa monture pour freiner. Le choc fut trop dur pour John, ce qui l’ejecta.

Mais la force fut tellement grande, qu’il s’envola.
Il ouvrit les bras de sortes qu’ils soient comme des ailes.
L’air s’y engouffra et le leva vers le ciel.

Tranquillement, il rentre dans une mer de nuage,
Doucement à sa surface, avance à la nage.
Sur le voyageur le temps n’a aucune emprise,
Fuyant, s’envolant, n’ayant de maître que la bise,

De guide que les oiseaux, d’obstacle que les sommets,
De limites les cieux, de rêve l’univers entier !
Et plus jamais ne s’arrêtant dans aucun port,
Et vivant la vie, et vite oubliant la mort.

Et comme là haut, près des étoiles, tout est parfait,
Il dit au monde du bas : « Comme j’aimerai rester
Dans ce doux monde où jamais rien n’est pareil,
Et pour toujours, voler tout droit vers le soleil ! »

Le bruit produit par l’impact entre le sol et son visage tira John de sa rêverie.

Il se redressa sur son séant et releva la tête pour constater que son chameau était maintenant très loin.

What the fuck ?!