Distribution de vivres

Nombre de messages : 318 Date d'inscription : 11/05/2008

Alopias avait passé une bonne partie de la lune à distribuer les rations pour les malades dans l'espoir de les soigner. Il ne restait plus que Jade, la petite fille qu'il avait blessé par sa stupidité. Il s'en voulait.

Il avait trouvé le cadeau de Jade devant sa tente, de l'eau et des médicaments, preuve qu'elle ne perdait pas le sens de l'intérêt commun... Mais Alopias fut vexé qu'elle n'ai pas eu le courage de lui remettre en main propre.

Il lui avait préparé de quoi renouveler son stock de protéines, et pour ne pas trop la dégoûter l'avait préparé de façon à ce qu'elle ne puisse pas reconnaître la provenance de la viande, ayant passé des heures à broyer des larves et des lézards légèrement grillés en une bouillie compagne et compressé en des steaks à haut pouvoir nutritif.

C'était du pur favoritisme ! seule Jade en aurait ! c'était bien trop long à faire et cela gaspillait trop de protéines, mais Alopias voyait plus son action comme une tentative de conciliation, comme une façon de lui montrer qu'il tenait beaucoup à elle.

Il se dirigea vers Jade une fois l'assiette préparée et la "viande" accompagnée de racines.

-Je... c'est pour toi...

Il avait l'air de vouloir poursuivre sans savoir quoi dire, se résignant, il posa le plat devant les pieds de Jade. Et fit demi-tour en prenant un papier dans sa poche et en le dépliant pour le lire.

-Oui... je sais...

Nombre de messages : 225 Date d'inscription : 21/06/2008

Ce midi, Jade n’a pas faim. Alors que les autres déjeunent, puis partent se reposer avant de reprendre la marche, la jeune femme s’est mise a l’abri du soleil, sous sa tente, ouverte.

Assise à même le sol le pantalon relevé jusqu’aux genoux, elle se masse les mollets lentement. La tête ailleurs, perdue dans les conversations en sourdine, de la radio.
Ce sont des gestes presque rituels. Soulager son corps avec des crèmes et onguents.
Aujourd’hui, c’est avec une moue embêtée qu’elle entame son dernier flacon d’huile de soin.
Le mouvement circulaire de ses doigts sur ses jambes nues la délasse. La rouquine ferme les yeux, la tête penchée sur son épaule.

A la voix d’Alopias, Jade retient sa respiration. Ca fait combien de temps qu’il ne lui a pas adressé la parole ?
La jeune femme ouvre les yeux, et le dévisage sans animosité.
Pour elle ?
Il dépose quelque chose à ses pieds, hésitant. Elle le regarde tourner les talons, murmurer dans un souffle, et déjà, s’éloigner.

Expirer doucement.
Son regard tombe sur l’assiette. Pour elle ?
Un effort de présentation. Des petits steaks épicés, servis avec des légumes d’hiver. Il y a même, sur la viande, une petite branche de thym sauvage. Pour faire joli.
Un sourire nait sur ses lèvres alors qu’elle réalise que ca n’était pas au menu ce midi.
Pour elle.
Le parfum est alléchant. Le poivre délicat, une touche de rouge paprika sur la viande grillée.

Jade se lève, essuie ses mains dans une serviette tachée, prend l’assiette, et quitte l’ombre de sa tente.
Ses pieds nus dans le sable, elle rejoint Alopias comme si de rien n’était.
Il est occupé, Elle s’assied à coté de lui. Et sans réclamer son attention, goute le plat. Un morceau de viande porté à sa bouche, elle mâche sans bruit, puis soupire, satisfaite.
L’appétit vient en mangeant.

Nombre de messages : 318 Date d'inscription : 11/05/2008

Alopias était occupé à graver sa lance avec un petit silex, assit en tailleur sur un linge posé à même le sable brulant, dans l'ombre rassurante du auvent de sa tente tendu en un parasol de fortune.

Sur la lance, simplement quelques noms, presque tous de même tailles. Mais tous patiné par le temps, comme si ils n'y en avait pas eu beaucoup d'autres gravés depuis longtemps.

Il voit Jade approcher avec son assiette et s'assoir à coté de lui, comme si de rien n'était, il sent son cœur s'accélérer, s'attend presque à l'entendre le son de sa voix avant de se rappeler que c'est impossible.

Il la laisse faire, continuant à graver dans sa lance un nouveau nom, terminant un "J"

-Le soleil tape fort, tu ne trouves pas ?

Il se sent bête, elle vient le voir après une semaine sans communiquer et il parle du temps qu'il fait depuis deux mois !

-Je...

Se ravisant, il cherche une sortie de secours à son tourment, seul sa lance est à portée de main.

-Tu vois cette lance ? J'y ai gravé les noms de tous ceux dont j'ai perdu un jour l'affection pour des conneries, Raven, Tasartir, Emily...et tellement d'autres dont je me souvient à peine... c'était des Amis, des maîtresses, ils n'étaient pas tous blanc comme neige, mais je les appréciait assez pour qu'il aient de l'importance pour moi et que je souffre de les voir me mépriser. Naïma n'y est pas encore, Yhaminia et Erica non plus. J'y met seulement les personnes qui m'ont rappelé un jour qu'une amitié était fragile, quelques soit la puissance des sentiments éprouvés.

Il baisse les yeux et entreprend de graver un "A"

-Je suis déjà vieux, j'ai vu trop d'horreurs pour croire à nouveau ce que me dit mon cœur, j'imagine toujours le pire et je revois les trahisons dont j'ai souffert à chaque nouvel événement. C'est... compliqué !

Il semble vouloir parler, après une brève hésitation, il commence un récit, ne te regardant pas

-Tasie à été violé sans se débattre sous mes yeux et sa seule réaction a été de pleurer au lieu de me demander d'attaquer ma meilleure amie et elle à été violé à nouveau alors qu'elle était seulement à quelques mètres de moi et que j'avais promis de la protéger sans rien faire d'autre que de protéger son bourreau une fois libéré

Une larme coule sur sa joue alors qu'il termine nerveusement son "A"

-J'ai revécut ça l'autre soir en voyant Tan sortir de ta tente, je ne savais pas ce qu'il était venu te faire, mais j'ai eu le même sentiment d'impuissance à assurer ta protection, et le même dégout pour toi en le voyant sortir de ta tente sans même t'avoir entendu te débattre ou chercher un moyen d'appeler à l'aide.

Il commence à graver le "D" s'acharnant presque sur le bois.

-J'ai eu à nouveau le sentiment qu'une personne pour qui j'aurais pu passer des nuits sans dormir juste pour la rassurer ne me faisait pas suffisamment confiance pour m'appeler à l'aide en cas de besoin. Je t'ai détesté pour ça !

sa lame de silex dérape, sa main tremble, il ouvre sa gourde nerveusement, laissant sur le bouchon une trace de sang de son index ouvert et boit une gorgée d'eau. Oubliant presque la présence de Jade à ses cotés

Nombre de messages : 225 Date d'inscription : 21/06/2008

Il parle.
Lentement, en prenant des pauses, Alopias se dénoue.
Jade mange, les yeux rivés sur la lance. Ses doigts nerveux s’appliquent, elle ne voit plus que cela.
J.
Les noms de ceux qu’il a perdus…

Quand Il parle de viol, sa voix tremble à peine. Le récit est trop vif, le souvenir semble l’être aussi.
La jeune femme ne mange plus, levant son regard sur lui. Lire les expressions de son visage. Ecouter, horrifiée.
Revenir sur les doigts, et la pierre sur la lance.
A.

Calmement, il raconte cette fameuse nuit, avec Tan. Ses gestes le trahissent. La gravure se fait défouloir.
Esquisse d’un D.

Jade cille.

Quand il a finit sa version des faits, elle résiste à l’envie de le gifler de nouveau.
S’il savait. S’il savait comme elle a eu peur ! L’accuser de ne pas avoir trouvé un moyen d’appeler a l’aide, la révolte !
Alopias ne la regarde toujours pas. Plongé dans ses pensées à haute voix.
A nouveau il tremble. Et la pierre refuse de lui obéir. Il tremble comme ça toutes les nuits. Quand il prend son quart de ronde, et qu’elle fait semblant de dormir au coin du feu.
Maintenant, la jeune femme comprend. Un peu.
Il se coupe, tente de garder de la contenance en buvant un peu d’eau.
Elle, se mord la lèvre inferieure, observant son profil.
Une goutte de sang tombe dans le sable. L’assiette est posée à coté.

Souplement, Jade se redresse, et s’approche encore, comme un chat, pour se mettre derrière lui.
C’est avec une infinie douceur qu’elle enroule ses bras autour de lui, passant au dessus de ses larges épaules pour les croiser sur son torse.
Le risque du rejet. De ce mouvement brusque pour la repousser.
Elle le frôle, et vient poser son visage contre le sien. Regardant tout deux dans la même direction vide.
Un instant ainsi. Jade respire son air, la joue qui s’irrite sur sa barbe. La pression de ses bras fins se resserre, collant son corps menu contre son dos.

Délicate, elle pose un baiser sur sa nuque en relâchant progressivement son étreinte.
La muette se décale à peine, juste assez pour attraper la lance, et le silex. C’est à son tour de s’appliquer sur ce nom inachevé.
Insister, tout rayer d’un trait.
Elle regarde Alopias, lui montrant son ouvrage. Et lui sourit, pour la première fois depuis une lune entière.

Nombre de messages : 318 Date d'inscription : 11/05/2008

Alopias se laisse faire, il est ailleurs, perdu dans des souvenirs qui lui font manifestement mal. Ses yeux semblent vouloir verser des larmes, mais il n'en a plus, il reste silencieux, immobile.

Le contact des lèvres de Jade sur sa nuque associées aux effets des calmants lui font sortir un instant de son mutisme, il perçois la jeune femme s'afférant dans son dos, il se tourne, la regarde, interrogateur, essayant de comprendre la signification de son geste.

Il la voit sourire... il lui sourit aussi, pour la première fois depuis une lune entière. se tournant à moité, Il va pour poser sa main sur la joue brulé par le soleil, et remarque juste à temps son doigt sanguinolent.

Contrarié, il plonge sa main dans sa poche en quête d'un mouchoir, ses doigts entrant en contact avec le petit bout de papier.

Il le sort de sa poche, le déplie, le lit et fini par en barrer les mots d'un trait de sang avant de le montrer à Jade.

-Les paroles sont sensé s'envoler non ? c'est injuste que les tiennes n'aient pas d'ailes.

Il lâche le papier déplié, le laissant être entrainé par le vent du désert.

... les Calmants ont fait effet, le sourire timide d'Alopias en est la preuve