Message d'outre-mer

Assise sur le pont du voilier qui fendait les vagues, Naïma regardait l'horizon, et les oiseaux qui planaient doucement.
La mer était tranquille, et seule, Naïma laissait son esprit divaguer.
Et malgré elle, il prit un chemin qu'elle refusait d'envisager depuis son départ de Twitt.
John Carver ...

Elle aurait tant voulu qu'il soit là, à regarder les oiseaux avec elle, à la soutenir quand les vagues la rendaient malade, à se baigner avec elle dans l'océan.
Elle aurait tant voulu que lui aussi, ait son mot à dire quand ils avaient décidé où ils iraient.

Elle aurait tant voulu lui dire à quel point il lui manquait.
Comment la nuit, parfois, elle se réveillait, et regardait le visage de l'homme qui la tenait dans ses bras, espérant voir celui de John.
Comment son cœur se serrait, à chaque fois qu'elle entendait se prénom, "John", prononcé sur ce bateau, pour un autre que lui.

Elle aurait tellement voulu lui dire : "Mon amour, comme le goût de ta peau me manque, comme tes caresses me font défaut.
Comme ton sourire et ton regard pourraient éclairer mes journées."

Mais il n'était pas auprès d'elle, et c'était de sa faute, à elle.

Après avoir longtemps hésité, elle prit sa radio, et régla la fréquence.
Là encore, elle resta longtemps silencieuse, avant d'appuyer sur le bouton, et de parler doucement, d'une voix qu'elle espérait sûre.

John. Comment vas-tu ?
Moi ... Je vais bien. Sauf que je suis malade en bateau.
Heureusement, il y a beaucoup d'oiseaux qui volent autour de nous, et qui me font penser à autre chose que le roulis.

Elle se tut. Tout cela était tellement désuet.
Elle aurait voulu lui dire tellement plus. Mais ne s'en sentait pas le droit.

John Carver a écrit:: John était en entraînement.
Il ne faisait plus que ça depuis son retour.
Depuis le massacre qui avait eu lieu à Twitt. Il se sentait vide, il avait agit comme un robot, sans émotions.

Sa radio se mit à grésiller et il se rapprocha.
Écouta les mots et la voix de celle qui l'avait fait revivre.
Et celle qui l'avait définitivement enterré.
Il allait partir en laissant l'échange unilatéral.

Mais quelque chose le retint .
Il ne pouvait plus se contrôler.
Il vit sa main prendre la radio, appuyer sur le bouton et la porter à sa bouche.

- Bonjour Naïma.
Tu sais le mal de mer est une affection mentale.
Si tu te sens vraiment mal, surtout ne reste pas dans le bateau mais plutôt sur le pont.
Fixe une ligne de terre si tu en voit une au loin.
Sinon essai de rester allongée, la tête calé avec des coussins.

Son oiseau, Urubu, était revenu, depuis longtemps partit.
Il était resté un moment autour de lui.
Puis un matin il était mort, sans aucune explications.

- J'espère que tu es heureuse avec lui.

Il ne savait pas s'il attendait une réponse ou s'il devait retourner à son entraînement.
Il restait là. Figé, la radio à la main.

Elle s'apprêtait à répondre que Chysis lui avait expliqué comment ne pas vomir tout le temps, quand sa dernière phrase la coupa net.
Que répondre ...

Je ... Je suis heureuse, John.
Mais ... Pas autant que si tu étais là ...

Elle s'arrêta.
Elle se souvenait pourquoi elle avait finalement décidé de suivre Matthias.
Elle se souvenait comment elle s'était réveillé d'un étrange sommeil éveillé, où elle avait faillit perdre l'esprit. Sommeil dans lequel elle avait fait et dit tant de choses incohérentes et stupides.
Mais dans cette folie, John avait été une lumière, qui l'avait empêché de sombrer totalement.

Si seulement ...
Si seulement ses deux lumières pouvaient cohabiter, pour la rendre totalement heureuse.

Et toi ? Comment vas-tu ?
Et comment va Twitter ?

John Carver a écrit:: Il se sentait vide.
Plus rien d'autres n'avait de sens.

- Twitter est encore debout ...
Et moi je suis encore là pour le moment.

Il s'arrête un moment puis reprend.

- La Chute de ce monde arrive bientôt.
Je ne chercherais pas à fuir, c'est ainsi que cela doit arriver.
Ce monde touche à sa fin et j'irais rejoindre nombre de compagnons dans la clairière au bout du sentier.

Elle avait été sa renaissance.
Mais la fin approchait.

Heureux de t'avoir connu Naïma ...

Elle l'avait réveillé d'un sommeil dans lequel il s'enfonçait chaque jour un peu plus.
Pour le laisser ensuite au bord du chemin.

Leurs routes s'étaient croisées, pour une étincelle de bonheur, et un torrent de larmes.
Son chemin était jonché de cadavres, qu'elle laissait derrière elle. Elle arpentait le monde, et détruisait des vies, tout autour d'elle.

Il était temps qu'elle trouve un endroit où personne ne viendrait la trouver, et où elle ne pourrait plus faire souffrir les gens.

Pardon, John. Pardon ... Pour tout.
Au revoir ...

Pas Adieu. Jamais. Pour personne. Et surtout par pour lui.
Le monde s'effondrerait peut-être à nouveau, comme il le disait. Ou peut-être pas.
Mais d'une façon ou d'une autre, jamais, jamais elle ne perdrait l'espoir de le voir surgir, de derrière une dune, de derrière un arbre, avec un grand sourire, et son regard ténébreux qui la faisait tant frémir.

Je t'aime.

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