On se prépare ...

Nombre de messages : 248 Age : 36 Date d'inscription : 02/10/2008

Jack regarda faire Naima avec envie, serrant deux doigts dans son dos en espérant ne pas être le père.

Nombre de messages : 213 Date d'inscription : 01/10/2008

Gray avait entendu les cris et avait rappliqué fissa à l'entrée de la tente ou se massait le gros du groupe.

"On fait encore la fête sans moi?"

Demanda Gray qui, au bruit venant de l'intérieur de la tente, commençait tout juste à comprendre la situation.

Nombre de messages : 1225 Date d'inscription : 08/06/2008

L'air glacial requinqua passablement le jeune homme qui était bien content que la maman soit enfin entre de bonnes mains. Dardant un regard acéré sur le camp, il constata que Fawkes n'avait pas vraiment suivit sa... "suggestion". Henri M. se trouvait être toujours manquant. Le peu de motivation ambiante le laissa croire qu'il pouvait déserter le poste attribué.

Après s'être enfoncé bien plus loin dans la neige, Matthias trouva enfin celui qu'il cherchait: Henri M. alias "Batman" comme il se plaisait à l'appeler. L'homme de l'ombre s'était terré après la discorde, c'était son habitude. Et plus le temps passait moins on le voyait au sein du groupe. Pourtant le jeune homme sentait souvent sa présence invisible non loin, surtout lorsqu'il était avec Onze.

Le barbu semblait être à la recherche de sombres songes perdus dans l'immensité immaculée. Néanmoins son oreille avisée détecta sans doute le pas de Matthias faisant crisser la neige profonde. Le jeune homme posa une seconde sa main sur l'épaule carrée puis s'assit à ses côtés. Chose inhabituelle puisque les seuls rapports qu'ils n'avaient jamais eu s'étaient concrétisés par des piques verbales lancées lorsque Henri était décidé à être sociable.

Il tourna la tête vers son voisin, attendant que celui ci daigne croiser son regard pour déclarer:

"C'est le moment de prouver qu'elle s'est pas plantée. Yen a encore pour un moment mais tu ferais bien de te dépêcher d'être à ses côtés. Tu vas être papa, Batman.

...

J'espère que ce sera une fille et qu'elle n'aura pas ta barbe."

L'Hiver était là, calme et tranquille, semblable à Henri en cette matinée jusque là sereine. Debout, statique, les pieds recouverts par une glaciale couverture de neige délicate, il fixait un horizon où ciel grisâtre et plaine blanchie ne faisaient qu'un.
Parfois, une bise délicatement acérée soulevait une vague et cotonneuse écume de flocons qui venaient s'échouaient dans ses longs cheveux ébènes. La vision onirique de cet environnement verglacé l'envoutait : son esprit, précédemment échaudé par des altercations d'abord sanglantes, puis verbales, s'échappait en de simples et reposants songes. Il clôt ses yeux, et s'abandonna quelques instants.

Juste quelques instants...

Soudain, un bruissement, feutré et lointain. Il baissa sa tête, les yeux toujours baissés. Des pas, rapides, se rapprochaient, bientôt suivi par le murmure d'un souffle.

Une main se posa sur son épaule anguleuse. Il la reconnut de suite... Que pouvait-il donc lui vouloir, encore ? Asséner une dernière remarque assassine, pour conclure leur voyage de la manière dont il avait débutait... Peu importe...

Pourtant, le contact de cette main lui sembla inhabituel : doux, mais ferme, tremblant mais sans animosité. Il tourna les yeux, fixa le regard de Matthias, en silence.

Celui-ci ne parla pas de suite... Mais les quelques mots qui suivirent eurent sur Henri l'effet d'un bombe, bien plus encore que toutes les railleries que le jeune homme extraverti avaient pu lui lancer.

L'Homme Sombre ne répondit pas , se mordant simplement la lèvre inférieure.

"Mon Dieu, ça commence..."

Il se mit alors face au jeune homme, dont il recouvra la main par la sienne.

"Merci, Matthias... Merci...

Allons-y."

Nombre de messages : 1225 Date d'inscription : 08/06/2008

Le contact d'Henri rendit une impression très désagréable au jeune homme. Mouvement sincère, sans doute, mais pour Matthias il restait celui qui avait refusé une main tendue le premier jour. Sourire cynique, "allons-y" Batman était-il prêt à partager le moment de la naissance ?

Il suivit nonchalamment l'homme de l'ombre, mains dans les poches et n'entra pas à sa suite dans la tente. En entendant les cris déchirants mais de plus en plus faible d'Onze, le jeune homme se mit à faire les cents pas un peu plus loin.

Une fille, une petite fille. Il lui avait dit qu'il en était persuadé. Matthais tournait, revenait sur ses pas et songeait sombrement. Une fille, sa fille peut être, qui allait être élevé par ce dingue. Décidément il ne pouvait pas supporter ce type avec ses préceptes de sauvage taciturne.

Et finalement de penser à une fillette sous le joug de l'instruction froide d'Henri, il se prie à espérer au dernier moment que la jeune femme mette au monde un garçon...

Nombre de messages : 748 Date d'inscription : 07/07/2008

Quand Naïma s'approcha d'elle, Onze ne put retenir un frisson. Allait-elle la tuer ? Tuer son enfant ? Ou, au contraire, allait-elle l'aider ? Elle laissa pourtant faire la brune sans rien dire, s'obligeant à ne penser qu'au bébé, ne songeant à aucun moment à son intimité violée...

Onze sentit la main de Matthias l'abandonner, souhaita qu'elle fut remplacer par celle d'Henri mais trouva uniquement Jack, un de ses rares amis qui ne s'était pas encore éloigné d'elle...

RAaaaaaahhhh...

Elle poussait, encore et encore, espérant de toutes ses forces faire naitre ce bébé qui la martyrisait... Dans un souffle, elle demanda :

Où est Henri ? Il doit être là... pour... le bébé...

Oh Naïma, j'ai tellement mal...

Les minutes s'écoulaient... Elle hurla à nouveau...

J'n'ai pas la force de continuer... Je ne peux pas...

La fin était proche mais Onze l'ignorait. Encore quelques efforts et tout serait fini. Si la future maman tenait le choc jusque là...

Le bébé était en bonne position. La tête vers le bas.
Le col de l'utérus était bien dilaté. Le bébé sortirai facilement. Si Onze continuait de pousser.

Elle sorti sa main, et l'essuya sur la couche de Onze, déjà trempée de liquide amniotique.

Ne t'arrête pas, Onze. Si tu arrêtes, il meurt, et tu meurs.
Alors continue de pousser.

Puis Henri rentra dans la tente.
Naïma soupira, et dit pour elle, s'adressant à Matthias.

J'avais dit personne !!

Puis regardant l'homme, elle se décida à lui parler, malgré tout le dégoût qu'il lui inspirait.

Tu prends sa main, et rien d'autre. Tu ne bouges pas avant que je le dise, tu ne parles pas, pour na pas arrêter le rythme de sa respiration.
J'ai aucune envie que tu fasses tout foirer.

Il y en avait tellement, des hommes qui paniquaient dans ces cas là, et qui provoquaient des catastrophes.

Nombre de messages : 162 Date d'inscription : 08/07/2008

John se tenait au côté de Naima, un petit couteau rougis dans une main et une tonne de linge dans l'autre.

Il n'y avait plus qu'à attendre.

Il écoutait sans broncher les cris et les délires de Onze, et il se disait que, décidément, les moutons sont bien plus intelligents : on a pas besoin de leur expliquer ce qu'il doivent faire pour mettre au monde leur petit. Et puis il ne partent pas dans des délires sur la vie, la mort, l'univers et le reste...

John tenta de la calmer. Il prit son pic à brochette porte bonheur et lui mit dans la main.

Avec ça, ça ne peut que bien se passer.

Il lui lança un léger sourire et retourna à sa place.

Nombre de messages : 213 Date d'inscription : 01/10/2008

Gray jeta un coup d'œil dans la tente, à présent pleinement conscient de la situation. Tout avait l'air de bien se passer, du moins, c'est ce qui lui semblait depuis sa position. Il observa tour à tour les personnes présentent, visiblement, Naïma menait les opérations d'une main experte.

"Besoin d'aide?"

Il ne voyait pas bien ce qu'il pouvait faire de plus mais, en tant que médecin, il lui aurait semblé mal venu de rester sans rien faire. Il s'interrogea un instant sur la stérilité du couteau de John mais chassa provisoirement ses doutes en attente d'une réponse.

Nombre de messages : 748 Date d'inscription : 07/07/2008

Quand elle vit enfin Henri, Onze lui lança un pâle sourire, soulagée de savoir qu'il assisterait à la naissance de leur enfant et espérant au fond d'elle que cela le réveille un peu...

La jeune femme n'avait plus que quelques efforts à fournir. Les derniers mais il lui semblait que c'était les plus difficiles. Elle allait être mère. Une pointe de bonheur fit son apparition, faisant oublier la douleur pour de furtives secondes.

Il arrivait, elle le savait. Onze bloqua sa respiration et continua...

Le bébé arrivait. Naïma appuyait un peu sur le ventre. Cela ne servait à rien, sinon à donner l'illusion à la mère d'avoir une aide.

Un globe gluant commença à poindre. La peau de Onze, autour, était étirée à son maximum.
Le globe força, força ... et fini par passer. La tête était sortie.
Une dernière poussée, et les épaules passèrent. Le reste suivi tout seul, tiré par Naïma.

L'enfant sorti, elle attrapa le couteau que John tenait, et coupa d'un geste sûr le cordon. Avec l'un de ses liens, elle fit rapidement un noeud avec le bout de cordon qui restait accroché au ventre du petit.

L'enfant n'avait toujours pas crié. Naïma le souleva donc, et lui claqua doucement les fesses.
Le cri de la vie se fit alors entendre. Un cri incroyable. Puissant, révolté. Le cri d'un enfant qui hurle à la face du monde qu'il est né, qu'il est là, et que le monde devra dorénavant compter avec lui.
Naïma ne put s'empêcher de sourire, devant les petits poings que la petite chose tenait fermés, en gardant le petit doigt levé.

Elle essuya ensuite le petit être de tout le mucus et le liquide qui le recouvrait. Il faisait trop froid pour le laver correctement. Ça se ferait plus tard ...
Elle l'emmaillota dans ce qu'elle trouva, pour le réchauffer.

Puis elle amena le bébé vers elle, et le regarda dans les yeux. Ses grands yeux, déjà ouverts et curieux.

Bonne chance, Petite chose. Tu vas en avoir besoin.

Elle posa l'enfant sur la poitrine de Onze. La petite bouche chercha immédiatement le sein de sa mère.

C'est une fille.

Elle revint entre les cuisses de Onze, ramassa les linges souillés, en fit une boule, avec le placenta qui avait suivi l'enfant au milieu.
Elle plongea les mains dans le récipient d'eau, pour les laver.
Et elle sortit, jetant au passage la boule le linge dans le feu.

Elle avait fait son boulot. L'enfant et la mère étaient en bonne santé.
Elle pouvait partir ...

Nombre de messages : 748 Date d'inscription : 07/07/2008

La délivrance tant attendue était enfin arrivée. A bout de forces, elle souffla enfin et se détendit légèrement. Quand le cri du bébé résonna, le coeur de Onze se gonfla, de soulagement, de bonheur mais aussi de fierté. Elle savait pertinemment que le futur ne serait pas facile mais elle ne voulait pas encore y réfléchir...

Quand la petite fut posée contre elle, une larme roula sur sa joue. Elle se releva doucement pour regarder sa fille. Quelques cheveux bruns sur son crâne, des pieds et des mains minuscules, un petit ventre rebondi et de grands yeux. Bleus mais tirant sur le vert. La couleur préférée de Onze.

Sa main caressa la tête du nouveau-né, et elle lui murmura :

Sarah...

La jeune maman se rallongea, tenant précieusement son bébé contre elle. Elle voulait dormir mais il lui restait une chose encore à faire. Du regard, elle chercha Naïma, déjà partie. Onze soupira avant de s'adresser à ceux encore présents près d'elle :

Remerciez Naïma pour moi. Et dites lui... Dites lui pardon aussi...

Nombre de messages : 1225 Date d'inscription : 08/06/2008

Matthias quant à lui avait finit par s'épauler à l'arbre qui avait vu la maman s'effrondrer un peu plus tôt. Occupé à canaliser sa perpétuelle impatience et à essayer de ne penser à rien, le jeune exalté paraisait bien sombre.

Soudain un cri le fit sursauter. Un cri qui n'avait rien de commun avec ceux de l'accouchée. Un cri très particulier de vie, d'espoir et de mécontentement, issu de la première confrontation à ce monde qui brule les poumons dès le début.

Puis ce silence qui laissa tous ses sens en alerte.

Lorsque Naïma s'extirpa de la tente, Matthias resta tétanisé et regarda dun air légèrement halluciné le ballot prendre feu...

Nombre de messages : 162 Date d'inscription : 08/07/2008

Le bébé était sortit. Une fille. Enfin peu importe le sexe. Car comme disait Daniel Pennac : "Les enfants sont des énigmes lumineuses." Et comme disait Lao Tsu La Montan, dont la sagesse n'est plus à démontrer : "Les enfants, ça sert à rien."

John observa donc les premiers traitements que subissait le bébé. Quand Onze l'eut prit dans ses bras, il se pencha pour le voir de plus prêt et se redressa, affichant un air légèrement déçu.

Mouais... c'est pas si mignon que ça.

Puis sans demander son reste, il emboîta le pas de Naïma.

Nombre de messages : 10 Date d'inscription : 18/12/2008

Nouveau. Inconnu. Froid. Bruit. Faim. Ce furent les premières sensations que ressentit Sarah. La petite cria, libérant ainsi ses poumons et affirmant d'emblée sa présence.

Puis la chaleur et la voix bien connue de sa mère la réconfortèrent. Elle se calma... Pour quelques minutes uniquement, avant de faire entendre à nouveau sa voix :

Ouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuin !

Nombre de messages : 1225 Date d'inscription : 08/06/2008

Second cri venant de la tente. Matthias, soulagé, se dit que ça signifiait sans aucun doute que tout allait bien. S'approchant du brassier, il prépara silencieusement une infusion avec les herbes de Naïma.
Très curieusement le jeune homme ne posa aucune question. Tendant la timbale à l'herboriste, il demanda sans la regarder:

"Mon ange... P'être qu'il faudrait...'fin, tu voudrais pas... aller lui apporter ton reméde, pour moi. S'il te plaît."

Bien qu'il se soucit du bien être de la maman, il ne voulait manifestement pas remettre un pied dans la tente...

Le remède ne servait plus à rien. Le bébé était sorti, et les muscles du ventre de Onze ne la ferait plus souffrir.
Mais Naïma prit la tasse quand même, sans un mot.
Pendant quelques secondes, elle perdit son regard dans les volutes de vapeurs qui s'échappaient de l'infusion pour aller mourir dans l'air glacial de l'hiver.
La tisane avait bon gout, et ne poserai aucun soucis pour l'allaitement.
Après tout ... Naïma avait encore quelque chose à dire à Onze. Et cette tisane lui fournirait une excuse pour y retourner.

Elle hocha doucement la tête, pour signifier à Matthias qu'elle y allait.
Comme il ne la regardait pas, Naïma ne su pas s'il avait eu le message ou pas.
Elle ne dit rien. Ni que Onze allait bien. Ni que le bébé était une fille. Elle se contenta de faire demi-tour, et de s'arrêter devant la tente.

Dans cette tente, il y avait Onze, qu'elle venait voir. Cette visite la répugnait, mais il le fallait.
Mais il y avait aussi Henri, dont elle se serait très passée. Sa présence la gênait. Parce qu'il la dégoutait. Parce qu'il avait ce regard sombre qu'elle n'aimait pas. Celui d'un homme qui s'ennuie de vivre, et qui ne trouve de joie que dans le sang ...
Elle entra néanmoins, sa tasse fumante à la main.

Onze était en train de bercer la petite qui avait la bouche collée contre le sein de sa mère.
Henri, à coté, regardait, mais sans entrer dans la scène, comme à son habitude. Observateur lointain, et non impliqué. Même devant son enfant ...
Onze avait un grand sourire, et un regard extrêmement doux, que Naïma ne lui avait jamais vu.
Une impression étrange se fit sentir au creux du ventre de Naïma. De l'amitié ...

Elle secoua la tête pour chasser cette impression, bien mal venue.
Elle s'agenouilla près de la mère, et lui tendit la tasse.

De la part de Matthias.

Puis elle regarda Sarah, qui tétait goulument.

Pour la laver, fais-le avec des linges mouillés, à l'abri du vent, et essuie-là tout de suite.
Allaite-la le plus longtemps possible. Cela aide ses défenses immunitaires à se mettre en place. En fait, pour le moment, elle ne sais pas se défendre contre les maladies, et c'est toi, à travers ton lait, qui la protège.
Couvre-la bien. Surtout la tête. Les bébés perdent beaucoup de chaleur par la tête, à cause de leur grosseur par rapport au corps.
Tu peux commencer à lui donner des purées, des bouillies, vers 6 mois. Que des fruits et légumes.
Il faudra attendre encore 2 ou 3 mois avant de commencer avec la viande.
Et continue à allaiter, pendant tout ce temps.

Elle releva enfin la tête vers Onze, et lui dit le plus froidement possible.

Maintenant, je m'en vais.
Comme tu l'as dit, tu t'en fiches. Mais je préfère te prévenir.
Adieu.

Et elle commença à se relever, pour s'en aller, et ne plus jamais avoir à supporter la présence de Onze, et d'Henri.

Nombre de messages : 748 Date d'inscription : 07/07/2008

Onze murmurait sans cesse à l'oreille de sa fille, la berçant doucement jusqu'à ce que la petite se calme et se remette à boire. Ce fut à ce moment là que Naïma refit son apparition, une tasse à la main, que la jeune femme refusa avec un sourire :

Remercies Matthias mais vraiment là, ce dont je rêve, c'est d'une clope ! Voire même deux !

Sarah remua légèrement, comme pour signifier à sa mère que l'idée était pour le moment bien mauvaise... Onze écouta la brune d'une oreille attentive, bien que luttant difficilement contre le doux appel de Morphée. Quand l'herboriste se releva et fit un pas pour partir, Onze l'interpela d'une voix fatiguée :

Naïma, attends...

Sarah s'était endormie et sa mère déposa un léger baiser sur sa tête avant de plonger son regard dans celui de la brune :

Merci d'être venue. De m'avoir aidée. Je n'y serai jamais arrivée sans toi.

Onze s'arrêta quelques secondes, sans quitter les yeux de Naïma, cherchant ses mots, hésitant à en prononcer certains...

Je suis désolée. Pour Muse... J'espère que tu nous pardonneras un jour... Vraiment...

Naïma ne dit rien. Elle resta là, quelques secondes, à regarder Onze.
A sonder son regard, pour voir si elle était sincère.
La tendresse qu'elle y avait vu pour Sarah semblait rester quand elle lui parlait, à elle.
Onze la regardait, avec un tout nouveau regard. Un regard que Naïma aurait aimé voir bien plus tôt. Un regard qu'elle-même avait déjà posé sur pas mal de gens.
Finalement, Onze était humaine, et capable de tendresse ...
Finalement, elles avaient des choses en commun ...

Le noeud au ventre se reforma ...
Sa main se serra autour de la tasse toujours fumante. Elle se concentra sur la sensation de brûlure, pour ne rien faire, ou dire, de stupide.

L'image de Fawkes s'agenouillant devant elle, lui tendant son arc, lui avouant le crime qu'il venait de commettre, et lui demandant de le juger s'imposa à elle.
Lui aussi, à sa façon, avait demandé pardon.
Peut-être, un jour, pourrait-elle ...

Elle relâcha l'étreinte sur la tasse, et sorti sans rien ajouter, sinon un hochement de tête à Onze.
Pourquoi ce geste ? Elle ne savait pas. Pour lui monter qu'elle avait entendu ? Ou pour signifier plus ?

En se retournant pour partir, son regard croisa la silhouette de Henri.
Aussitôt, son regard se fit plus sombre. Et sa main alla tâter la petite fiole qu'elle avait toujours dans la poche.
Elle sorti, et vida la tasse sur le sol, créant un cratère fumant dans la neige.

Pas devant Onze. Pas devant Sarah ...
Et pourtant ... Elle qui jugeaient ceux qui tuaient, elle qui était pacifique ... l'envie de mort se faisait de plus en plus présente.
Voir Henri sans vie. Au même endroit que là où il avait enlevé celle de Muse ...
Elle avait envie de tuer. Pour venger, pour protéger ...
L'image de Fawkes lui revint.
En relevant la tête, elle le vit, non loin, qui attendait la suite des événements.
Et enfin, elle compris son geste ...

Henri était resté passif et silencieux durant l'acte, comme lui avait ordonné de manière cavalière la sage-femme de fortune. Il ne lui avait pas répondu, restant enfermé dans une bulle de mutisme et d'indifférence, dont la seule lucarne d'intérêt donnait sur Onze et son effort pré-maternel. Une main donnée comme un soutien fragile, une légère caresse sur un front humide, voilà à quoi s'était limitée sa frustration de ne pouvoir faire plus pour la jeune femme.

Calme et posé, en toute circonstances...
Pourtant, il ne fallut qu'une petite chose, un petit cri aigu et perçant pour briser la carapace.

Une fille... Sa fille... Sarah, Sarah M. : petit bout de femme délicat, encore rougie par l'amnios et l'excavation, elle se décidait enfin à montrer son visage, tel un invité désiré mais surprise, lové confortablement sur la poitrine de sa mère.

Henri demeura silencieux. Mais pas par prudence, cette fois-ci, mais par émotion. Ses lèvres fines affichaient un sincère sourire de bonheur alors que ses yeux gris, d'habitude si terne, s'enflammaient d'une intense émotion. Ses longs doigts rugueux continuaient à caresser les cheveux sombres et collés de Onze désormais mère. Il aurait voulu toucher l'enfant, mais, se retint, laissant les 2 femmes de sa vie profiter de ce moment de symbiose rare.

A cet instant, Naïma rentra dans la tente (il ne l'avait même pas vu sortir), finissant son travail en donnant les premiers et bons conseils accompagnés d'une douce tisane de sa fabrication. A son arrivée, l'Homme sombre redevint absent, inerte, objet passif d'une scène se jouant là. Quelques échanges d'amicaux sentiments, et Naïma tira sa révérence, une bonne fois pour toute.

Une envie primaire de la remercier de tout son être lui tordait les entrailles, mais il se ravisa, se réfugiant derrière un raisonnement froid et pragmatique; malgré toutes leurs inimitiés, elle était à la base de la réussite de cette naissance. Mais pourquoi donc avait-elle fait tout ça, plutôt que de fuir et de laisser les choses se faire par elles-mêmes ?
Pour les parents, assassins qu'elle jugeait inhumains et viciés...?
Pour l'enfant, possiblement coupable d'être le fruit innocent d'un amour adultère ?
Non, rien de tout ça... Si elle avait fait ça, c'était dans un mobile purement égocentrique : elle s'était aidée elle-même, se jurant de la sorte qu'elle pouvait être humaniste en tout lieu et en tout instant, prouvant ainsi aux déséquilibrés et sociopathes que le salut vient du Meilleur, qu'il l'est encore plus quand il s'inscrit dans un sacrifice personnel... "Aide tes ennemis et tu en sortiras grandi"

Il capta une dernière fois son regard alors qu'elle sortait, et comprit de suite. Elle désirait sa mort, plus que tout. Elle le souhaitait agonisant, là, au sol, foudroyé dans un gasping morbide. Il ne répondait que d'un faible plissement de sourcils sur des yeux éteints. C'était lui le Méchant, après tout, le Tordu, le Mal, le Sans-Coeur... Ainsi soit-il ! pensa-t-il... S'il pouvait de la sorte soulager de vices Onze et Fawkes, cela lui convenait. Et puis, cela serait un dernier cadeau d'Adieu pour Naïma : les gens Bon et Bien ont besoin pour vivre d'eau, de nourriture, de médicament, et de Manichéisme. Il lui offrait ce dernier.

Lorsqu'elle passa le drap de l'entrée, il brisa son attitude autistique et rejoint sa famille : il avait désormais tant de choses à partager...

Nombre de messages : 1225 Date d'inscription : 08/06/2008

Le contenu du mug s'incrusta dans le sol gelé.
Aïe ! Est-ce que Onze avait refusé, est-ce que ça c'était mal passé, y avait-il un autre problème ?

Le jeune homme s'approcha de Naïma. Avec sa troublante désinvolture, largement démentie pas la curiosité qui transpirait de son regard, Matthias demanda:

"Nous serons prêt à décamper d'ici dans quelques temps. Quelle direction souhaiteras tu prendre maintenant ?"

Ceux qui se ralliaient à l'herboriste préparaient en effet leurs affaires. Et Matthias fournissait d'important efforts pour ne pas poser les autres questions qui l'intéressaient.

Vers le nord. On reste en plaine pour l'instant, tout en longeant le désert.

Le regard de Matthias était éloquent. Il voulait savoir.
Et une partie d'elle ne voulait pas lui dire. Elle ne voulait pas lui dire que Onze allait bien. Que la bébé aussi. Et que devant elles, Naïma avait senti sa haine fondre ...
Elle ne voulait pas lui dire son envie de voir Henri mourir.

C'est une fille.
Ses parents veillent sur elle.

Tout était dit ...
Il était temps de partir.

Nombre de messages : 748 Date d'inscription : 07/07/2008

Naïma n'avait rien dit mais Onze savait qu'elle n'était pas restée indifférente à ces paroles. Elle ne pouvait rien faire de plus que de lui demander pardon et ne se sentait plus le courage de se battre un tant soit peu contre la brune...

Les doigts d'Henri continuaient à parcourir ses cheveux et son visage, et Onze soupira d'aise. Elle le regarda, rayonnante de bonheur et lui souffla :

Elle est magnifique...

Doucement, la jeune femme leva sa main pour frôler la joue de son amant, silencieux comme à son habitude, quasi impassible... Onze ferma les yeux...

Je suis épuisée...

Sa phrase à peine terminée que déjà son esprit vagabondait ailleurs... Dans toutes les images qui défilaient, méli mélo de souvenirs et de pure imagination, s'incrusta celle de Matthias. Il n'était pas encore venu voir le bébé, chose relativement étrange de la part du curieux jeune homme.
Mais Onze ne s'attarda pas sur ces réflexions et sombra bientôt dans un profond sommeil, à l'instar de sa fille...