Quelques heures de terre ferme...

Nombre de messages : 1225 Date d'inscription : 08/06/2008

Deux lunes de mer déjà. Les jours coulaient, plutôt indolents. Matthias était heureux de naviguer, ça se voyait. En tout cas il appréciait bien plus le voilier que Naïma, ça semblait certain. Comme toujours il se montrait curieux et apprenait vite.

Pour se repérer, il disposait d’une carte assez incertaine, qu’il griffonnait et mettait à jour selon l’habitude qu’il avait toujours eu. Pensant obligeamment à la jeune femme, il décida qu’ils passeraient une journée et une nuit complète, sur ce qui semblait être un vaste banc de sable quasiment une presqu’île.

Le jeune homme avait préparé de quoi s’échapper avec l’herboriste, « pique-niquer », passer la nuit à la belle étoile, genre de surprise qu’il affectionnait particulièrement.

La terre ferme fut en vue après déjeuner, moment que Naïma ne supportait pas encore des mieux, et Matthias dit à ses compagnons de vogue :

« On va se poser là jusque demain. Quartier libre les enfants ! ‘fin pas trop non plus hein. »

Sur quoi il descendit chercher l’herboriste qui tentait comme elle pouvait d’oublier son mal. Matthias se pencha au dessus d’elle et lui caressa doucement la joue :

« Viens mon amour. On fait une halte. L’endroit est merveilleux. »

Le roulis la rendait toujours malade. Moins qu'avant, elle sentait qu'elle s'habituait, mais elle avait encore du mal à manger sans tout rendre ensuite.
Des fois, la mer était calme, et plus aucune vague ne venait faire danser le voilier. Ces moments étaient pour elle de véritables moments de bonheur. Mais bien sûr, ça ne durait jamais.

Donc, depuis leur départ, elle mangeait à peine, et dormait très mal.
C'est pourquoi, au mot "halte", elle bondit sur ses pieds, et se pendit au cou de Matthias, murmurant presque en pleurant :

Merci.

Et elle se rua sur le pont pour regarder la terre approcher, résistant à l'envie de sauter à l'eau pour la gagner à la nage par égard pour Matthias.
Et aussi parce que le bateau arriverait carrément avant elle !!

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Ils débarquèrent quelques temps plus tard sur la presqu'île de sable. Matthias choisit un genre de crique entourée de dunes herbeuses d'où ils pouvaient voir le bateau. Après avoir succinctement installé leurs affaires, il sourit à la jeune femme manifestement heureuse d'avoir mis pied à terre.

On pouvait constater que les dunes étaient le repère d'une foule d'oiseaux de mer, tous plus inconnus les uns que les autres pour Matthias. D'ailleurs si ca se trouvait certaines étaient inconnues tout court avant crash...

L'air content, le jeune homme invita Naïma à une promenade:

"J'vais voir à trouver du bois pour te préparer un bon p'tit repas... On fait un tour ?"

La terre ferme, et des oiseaux. Le bonheur à l'état pur.
Elle lui fit un grand sourire.
Un bon repas, et ce serait l'extase.

Elle le suivit donc à travers les rochers, même si elle doutait de trouver du bois sec ici. Au mieux, ce serait du bois flotté, et sans doute encore imbibé d'eau, qui dégagerait une fumée terrible, mais aucune flamme.
Mais même cela la réjouissait.

Une crique, au bord de la mer. Un pique-nique.
Un déjà-vu, mais avec un nouvel état d'esprit pour elle, ce serait forcément bien mieux.
Mais cette fois-ci, elle était curieuse de voir le repas prévu.

Après avoir marché quelques temps parmi les rochers, et trouvé miraculeusement quelques branches sèches, ils retournèrent vers la plage pour allumer un feu qui n,e durerait sans doute pas très longtemps, mais suffisamment pour cuire le repas.

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C'était bien dommage que Naïma soit plus curieuse du repas cette fois là que la dernière parce qu'il n'avait rien pu prévoir de grandiose ni de simplement notable.

L'après midi s'était écoulée sans qu'ils n'aient le temps de s'en rendre compte mais il était encore relativement tôt. Le jeune homme entama néanmoins les préparations puisqu'il imaginait bien que sa compagne devait mourir de faim. Quelques beaux poissons pêcher le matin même et grillés au tourne broche.

En guise d'apéritif, il sortit une des bouteilles de bière qu'ils avaient découvertes.

Pendant cuisson, Matthias observait d'un œil pensif les oiseaux qui rentraient se coucher. Quelques réserves de viandes supplémentaires pour sortir de l'ordinaire poisson ne seraient sans doute pas à négliger...

Souriant, l'air heureux et détendu, il s'assit aux côtés de la jeune femme tout en débrochant la poiscaille. Il menait la conversation comme d'habitude, posant des questions, commentant... Soudain il lui dit:

"Tu sais... j'étais persuadé mais alors absolument certain que tu savais et aimais naviguer..."

Ça la fit rire.

Pourtant, je t'ai dit que j'avais grandit loin de la mer. Et que je ne l'avais vue qu'une fois, petite fille.
Quand aurais-je pu apprendre à naviguer ?
Et qu'est-ce qui a pu te donner cette idée ?

Elle prit la bouteille de bière pour en boire une gorgée.
Sans vomir juste après, quel plaisir !!

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Tout en dépiautant leur repas, Matthias secoua la tête et rit.

"Je ne sais pas vraiment. Il est très possible que ce soit l'histoire de sirène qui m'ait faite grande impression puis le fait que tu construises le voilier... Et tu sais nager ! Je pense que dans mon esprit si tu as pu apprendre à nager tu as pu apprendre à naviguer."

Il releva les yeux et donna sa part à Naïma en souriant, légèrement taquin.

"Et maintenant j'imagine que tu es morte de faim ! Est-ce que j'extrapole trop encore ?"

Elle rit encore en prenant une des brochettes de poisson.

Non, cette fois tu as raison. J'ai faim. Et je vais enfin pouvoir manger correctement.

Elle mordit dans le poisson, et réussit à montrer à Matthias qu'elle trouvait ça bon, en marmonnant et en haussant les sourcils. Ce qui aurait pu être parfaitement ridicule s'il y avait eu d'autres personnes pour la voir. Mais que ce soit Matthias ne la dérangeait pas. Il était souvent pire qu'elle.

Après avoir avalé, elle reprit :

J'ai appris à nager dans les rivières, et les lacs.
Les seuls bateaux sur lesquels je suis montée, c'est des barques, là encore sur rivière, donc sans vague.
Donc non, je n'ai jamais navigué sur la mer, et je ne sais pas vraiment naviguer. Je connais un peu la théorie, mais je n'ai jamais eu l'occasion de passer à la pratique.
Enfin si, maintenant, mais j'ai déjà du mal à gérer mon estomac, alors, la barre et les voiles en même temps ...

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"Homme libre, toujours tu chériras la mer ! disait le poète. Je pense qu'il ne s'agit que d'une question d'habitude..."

Matthias vint appuyer un baiser dans le cou de la jeune femme. Puis se reconcentra quelques instants sur sa gamelle. Glissant à nouveau un regard vers elle, il rajouta:

"Moi je pense que bientôt tu seras une vrai digne héritière de sirènes et de pêcheurs. Et tu inventeras un remède extraordinaire contre le mal de mer, à base d'extraits de poissons et d'algues ! Puis on trouvera un endroit de rivières et de mers. Comme ça on pourra avoir un voilier ET une barque...

Là, elle éclata franchement de rire.

Ce serait bien, oui. Je serai ma première cliente !!

Puis, le regardant, mi-amusée, mi-sérieuse.

Alors tu veux nous trouver une petite embouchure de rivière, pour installer notre maison, et voir nos enfants courir sur la plage ?

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"Et voir nos enfants courir sur la plage?"

Matthias releva à nouveau son regard brillant sur elle, un regard qui criait un grand oui. Un sourire un peu penaud comme d'excuses flotta sur ses lèvres. Il pensa à la dernière fois qu'il avait évoqué un avenir de ce genre où elle l'avait rabroué assez sèchement voir même carrément violemment.

Elle avait un air qui lui sembla moqueur... Redoutant de déclencher une dispute dans un moment qu'il voulait serein, le jeune homme baissa les yeux sur son assiette vide et répondit nonchalamment en ne s'avançant pas sur la question:

"J'aime bien le sable et l'eau..."

Son sourire perdit son teint moqueur, pour se faire tendre.
Même s'il ne l'avait pas dit, elle avait bien vu, et compris son regard.

Alors trouves-nous vite cet endroit, qu'on puisse s'y installer.

Elle posa son pic à brochette, terminé, et s'approcha de Matthias, en marchant à quatre pattes.
Elle écarta ses jambes, et s'installa entre, en lui tournant le dos, se blottissant contre son torse.

Des enfants ...

Sarah lui manquait. Elle s'était attachée à cette petite. Elle l'avait aimée tout de suite. Mais pendant ces quelques semaines, où elle avait tenu Sarah contre elle tous les jours, où elle l'avait nourrie, où elles avaient ri ensemble, ces jours-là, elle s'était attachée à elle bien plus qu'elle avait pu l'imaginer.
Bien plus que la logique le voulait.
Elle aurait tant voulu qu'elle soit là, à cet instant, avec eux sur cette plage.

Elle secoua la tête pour se débarrasser de ces pensées peu joyeuses.

Il est hors de question que nos enfants fassent leurs premiers pas sur un bateau. Après, ils ne sauront pas comment marcher sans le roulis !!

Elle rit doucement.

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Ebahi, Matthias la laissa s'installer entre ses bras sans rien dire. A la plaisanterie un court rire nerveux lui échappa. Le jeune homme plongea le nez dans la nuque féminine qu'il ne se lassait pas d'inspirer. Doucement il l'embrassa puis déposa ses lèvres à la jonction du coup et de l'épaule, cet endroit qu'il aimait tant.

Sarah lui manquait énormément, jamais depuis sa naissance ils n'avaient été séparé. Parfois son sourire se ternissait lorsqu'il y pensait et son regard semblait soudain moins rieur. Parfois il observait l'herboriste en songeant qu'il aurait suffit qu'elle croit en lui ne serait-ce que quelques minutes plus tôt... Il était persuadé qu'un jour où l'autre il la récupérerait mais ça ne suffisait pas à atténuer sa peine.

Cependant à ce moment là il lui sembla que son cœur se gonflait de joie parce qu'il avait cru jusque là qu'elle ne souhaiterait jamais avoir d'enfants. Il lui souffla à l'oreille:

"Mais je croyais que tu ne voul... C'est vrai ? Tu voudrais bien des enfants avec moi ? Un garçon qui aurait le magnifique sourire et les beaux yeux sombres de sa maman, une jolie fille qui aurait sa bouche, sa grâce et sa sauvagerie. Qui nous rendrons inquiets mais qui nous ferons rire. De beaux enfants insouciant et tout doré de soleil... "

Elle prit quelques secondes avant de répondre.

Un garçon qui aurait ton air moqueur, et ton flux de questions, et une fille qui aurait ton air sérieux, et ta capacité de gestion.
Ça promet !!

Elle rit encore.
La perspective était plutôt plaisante.

Elle se souvenait pourquoi elle avait refusé. Elle ne voulait pas faire de petit frère à Sarah, elle ne voulait pas être la deuxième femme qui graviterait autour de Matthias avec un bébé dans les bras.
Mais Onze n'était plus là ...
Les choses avaient changé.

Oui, j'aimerai bien avoir des enfants.
Je ne veux pas être la dernière descendante de la sirène.
Il faut juste trouver cet endroit parfait pour nous y installer.

Elle tourna la tête pour le regarder, et lui sourit.

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Matthias lui rendit un sourire débordant de joie. La serrant un peu plus contre lui il répondit doucement:

"Je trouverai."

Son regard habituellement brillant semblait luire de mille comètes et vouloir se fondre dans le sien. Il avait envie d'elle, de lui faire un enfant sur le champ. Il dit dans un souffle suppliant:

"Embrasse-moi.

Elle sourit encore, et l'embrassa tendrement.

Je ne t'ai pas dit la fin de la légende.
Un jour, le tout dernier descendant du pécheur devra plonger dans l'océan, et nager jusqu'au fond, pour prendre la place de la sirène, et lui permettre de remonter à la surface, et de vivre à son tour.
Je suis cette dernière descendante.
Pour le moment ...

Elle l'embrassa encore, en se retournant, pour lui faire face.
Et ses baisers se firent de plus en plus passionnés.

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"Ha non ! Hors de question que tu m'abandonnes pour Poséidon. Je serai plus fort que lui !"

Il rit, désinvolte, mais la regarda des plus sérieusement comme pour fixer l'instant. Son index passa sur l'arcade des sourcils, l'arrête du nez, vint effleurer les lèvres de la jeune femme.

"Chaque jour j'ai un peu plus envie de toi, mon ange Je ne sais même pas comment c'est possible..."

Puis les siennes les rejoignirent à nouveau pour mêler ardemment leur langue tandis que son index venait glisser le long de la mâchoire et chatouiller le cou.

Ils s'embrassaient, langoureusement, amoureusement.
Mais une idée surgit dans la tête de Naïma, et elle dut se détacher de Matthias pour exploser de rire.
Elle tenta vite de reprendre son souffle, se sentant plutôt gênée pour Matthias, qui ne devait pas vraiment comprendre.

Ça veut que la période dans notre vie où tu auras le plus envie de moi, ce sera quand je serais toute ridée, courbée, et pleine de rhumatismes ?

Elle rit de plus belle, incapable de se calmer, et bien désolée d'avorter ainsi la belle déclaration de Matthias.

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Un fou rire pareil étant hautement contagieux, Matthias garda son sérieux tant bien que mal, baissant les yeux, la mine contrite. Mais ce n'était pas un exercice facile à tenir en face de la jeune femme.

Du coup il l'attaqua soudain sauvagement. La renversant il protesta à moitié hilare:

"Heyyy ! J'ai précisé que je savais pas comment c'était possible !!! T'as pas le droit de te moquer !"

Pour se venger, le jeune homme se mit à la chatouiller à tout va. Bien décider à la faire rire jusqu'à ce qu'elle capitule.

Elle se mit à hurler tout en riant, sous les chatouilles.
Elle se tortillait, tentant de lui échapper, sans succès.

Elle parvint néanmoins à lui immobiliser les poignets, et à reprendre son souffle.

Non mais ... au moins, notre vieillesse sera intéressante.

Elle lui sourit, encore moqueuse, puis se redressa un peu pour l'embrasser.
Puis se laissant retomber sur le sol :

Alors, tu me montres à quel point tu as envie de moi maintenant ? Que je puisse imaginer ce que ce sera quand on aura 70 ans.

Son sourire se fit coquin, et un brin défieur.

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Matthias haussa un sourcil narquois et esquissa un sourire de chat joueur.

Se penchant sur elle, il l'embrassa à nouveau puis fit rouler une pointe de langue du cou jusqu'à la poitrine. Soulevant le vêtement et dénudant ainsi une des épaules, il accéda à l'un des tétons qu'il mordilla délicatement tandis que sa main s'infiltra sous l'étoffe pour faire naitre quelques frissons à l'orée de la toison pubienne.

Puis il rajusta le tissu déplacé, mit un léger coup de dents à la lèvre inférieure de Naïma et répliqua:

"S'il ne s'agit que d'une question d'imagination, je te laisse rêver la suite. Préviens moi quand ce sera ton anniversaire de vieillesse..."

» Quelques vieilles pages jaunies...