Premier examen médical

On devrait peut-être aller sous ta tente, on sera plus tranquille, non ?

Déjà Onze se levait, s'avançant vers l'abri de Naïma. Gaiement, elle partagea l'évolution de sa fille avec la brune :

Elle a déjà trois mois... Et elle fait ses nuits ! C'est un vrai bonheur, les tétés sont plus espacées aussi, même si elle dévore toujours autant ! Et elle gazouille beaucoup, je crois que ce sera une grande bavarde ! Elle attrape tout aussi...

La jeune femme pouvait continuer ainsi pendant de longues minutes, intarissable quand il s'agissait de Sarah, qui d'ailleurs, comme si elle comprenait qu'on parlait d'elle, commença à émettre quelques bruits...

Naïma écarta le pan de sa tente pour laisser entrer Onze et Sarah.
Elle regardait la jeune maman en souriant. Jamais elle ne l'avait vu comme ça. Elle parlait, parlait, avec un regard émerveillé.
Elle doutait que quiconque ai déjà vu Onze dans cet état.

Tiens, pose-la ici. Dit-elle en désignant la fourrure qui lui servait de couverture, et qu'elle avait plié pour en faire une couche confortable pour le bébé.

Elle déshabilla Sarah pour la regarder sous toutes les coutures. Les articulations, les fesses, la bouche, les yeux.

Tout va bien.
Les articulations sont bien sèches, c'est important, pour éviter les champignons.
Elle est trop petite pour commencer à avoir des dents, ses gencives vont bien.

Elle a de l'appétit, et elle est très éveillée. C'est bon signe.

Elle mit le bébé debout, en la soutenant sous les bras.
Sarah se mit immédiatement à simuler une marche.

Bon, ça, c'est très bien. C'est un réflexe important.
Et elle a un bon poids.

Elle reposa la petite sur la fourrure.
Sarah lui agrippa un doigts, et se mit à le secouer doucement en rigolant.

Naïma regarda Onze, qui regardait sa fille tendrement.

Elle va très bien.
Et, je sais que tu veilles bien sur elle, et qui s'il y a le moindre soucis, tu le verras tout de suite.

Parfait.

Onze regardait Naïma faire, souriante. Elle avait toujours eu horreur des médecins et de tout ce qui s'y rapportait, mais en voyant la jeune femme examiner sa fille, Onze savait que la petite était entre de bonnes mains.

Puis, sans aucune trace de méchanceté ou de rancoeur dans la voix, Onze demanda doucement à la brune :

Pourquoi lui avoir enlevé son père, Naïma ?

C'était un solitaire. Je ne pense pas que ce soit une question d'adaptation.

Onze reprit sa fille, l'embrassa doucement sur le front et la berça...

Il était en train de changer, depuis la naissance de Sarah. Oh il ne serait surement devenu jamais aussi enjoué que Matthias, mais avec le temps, qui sait...

Tu as pris à Sarah son père, et à moi l'homme que j'aimais. Je ne pense pas que ça vaut la perte d'un homme que tu n'as connu que quelques semaines ou l'adultère de ton amant. Tu t'es vengée de bien plus de choses avec Henri, des choses plus anciennes, pour lesquelles il n'avait pas à payer. Pour lesquelles Sarah et moi n'avions pas à payer.

La jeune femme fit un pause, étrangement calme dans cette confrontation... avec un pâle sourire, elle reprit :

On ne peut pas revenir sur le passé hein... Mais l'avenir... Il se modèle tous les jours. Et j'ai besoin de toi dans celui de Sarah. Dirons nous que nous sommes quittes ?

Le visage de la jeune maman pâlit quelques instants. Elle avait joué avec Naïma un coup de bluff, l'accusant sans preuve évidente, ne s'appuyant que sur ses soupçons, mais la brune venait de les confirmer...

Onze se mordit l'intérieur des joues pour ne pas craquer. Elle avait demandé à Naïma de la pardonner pour la mort de Muse, ce n'était apparemment pas suffisant. Mais la jeune femme ravala ses larmes et sa colère, et d'une voix légèrement hâchée par la douleur, elle se saisit du bocal en répondant :

Merci... Tu... Tu ne crois pas... Qu'il en faudrait beaucoup avant... Que le goût se retrouve dans le lait ?

Je sais. Mais en ce moment... Ce n'est pas facile...

D'un geste doux, elle retira sa robe de la main de sa fille, constatant avec un sourire amusé la tâche qui s'y était formé...

Je vais aller la nourrir avant qu'elle ne me déshabille complétement ! Cette petite morfale va finir par devenir tissuphage si je ne me dépêche pas !